Voici comment le balai est utilisé comme un «redoutable» détecteur de mensonges en Afrique
L’usage du balai pour détecter les menteurs ou voleurs, c’est la recette appropriée en Afrique pour débusquer efficacement les filous et autres menteurs patentés. Si la méthode d’utilisation peut légèrement varier selon le pays ou la personne qui s’en sert, il reste que le balai est un outil commun pour mettre à nu un mensonge, un vol…etc, dans plusieurs cultures africaines.
Comme mode d’emploi, il est question de prendre plusieurs suspects individuellement, les faire jurer sur deux balais, puis de passer simultanément les balais autour du cou de chaque personne.
Pour l’innocent, rien ne se passe. Mais au tour du coupable, l’étau se resserre inévitablement sur son cou et ne se desserre que lorsque la faute est avouée. Le plus souvent, le coupable reçoit un châtiment selon les règles locales.
«Il s’agit simplement ici d’un rite qui permet de déterminer l’auteur d’un vol ou d’un mensonge. Par son serment, toute personne soumise à ce rite proclame (et par conséquent, accepte) que le malheur s’abatte sur elle, si elle est effectivement coupable », a expliqué René Allou Kouamé, professeur titulaire d’histoire à l’université Félix Houphouët-Boigny.
Amoin, 47 ans, est une ancienne pratiquante de ce rite, aujourd’hui à la retraite. Elle a révélé avoir débusqué «avec brio» des milliers de menteurs grâce aux balais. Un intriguant métier qu’elle avait finalement abandonné à la faveur de sa conversion au christianisme, en 2014.
«Que vous acceptiez d’y croire ou non, c’est une pratique réelle et absolument efficace. Pour ce qui me concerne, je n’ai pas le souvenir que le verdict a une seule fois été erroné», a déclaré Amoin.
Interrogé sur l’efficacité de ce rite, le professeur René Allou Kouamé affirme ne rien savoir, mais laisse entendre que « l’Afrique est un vaste champ des possibles ». Pour ce qui est d’Amoin, l’efficacité « tient aux esprits auxquels elle fait appel ».
« Je me refuse à entrer dans les détails, mais c’est avec des esprits que je composais pour attraper le coupable. Mais le fait est que cette pratique ne sert pas qu’à attraper des voleurs ou des menteurs, elle peut aussi être un moyen de prendre possession de la personne qui s’y prête volontiers », a-t-elle ajouté.
Sur l’efficacité de la pratique, les historiens et anthropologues du droit expliquent qu’elle reposait sur plusieurs mécanismes.
D’abord l’aspect psychologique « de la personne qui s’y prête volontiers ». Le menteur aura souvent la gorge sèche. Dès lors, il sera plus enclin à s’étouffer en essayant d’avaler le morceau de pain.
Par ailleurs, ce moyen de preuve était aussi pratiqué avec plus ou moins de souplesse, très souvent pour confirmer l’intime conviction que le juge s’était d’ores et déjà forgée.
Dans le continent africain, le balai est entouré de toute une symbolique et des croyances, diverses et parfois étonnantes. Frapper quelqu’un avec un balai peut attirer sur lui la malchance ou le rendre fou. De même, balayer la nuit, c’est courir le risque de chasser le bonheur hors de sa maison, ou encore d’attirer dans sa demeure des mauvais esprits ou des sorciers.
Par ailleurs, le balai comme assemblage de brindilles, symbolise l’unité. Individuellement, la brindille ploie et ne tarde pas à rompre sous la pression. Mais ensemble, les brindilles ploient, mais ne rompent pas. L’union fait la force, c’est connu.
D’un autre côté, le balai est symbole de purification, de nettoyage spirituel. Ce n’est donc pas surprenant au fait qu’un balai, en l’occurrence le «Balai Citoyen», ait servi en octobre 2014 à chasser Blaise Compaoré au pouvoir. Lui qui y avait passé 27 ans.
Crédit photo: sputnik