Burkina Faso: la société civile demande le jugement du régime « Compaoré »
A l’occasion de la « journée de dénonciation de l’impunité des crimes de sang et des crimes économiques », une dizaine d’organisations de la société civile burkinabè ont appelé à « juger tout le régime » du président déchu, Blaise Compaoré.
Depuis le renversement du gouvernement suite à l’insurrection populaire d’octobre 2014, certains membres du dernier régime Compaoré sont jugés devant la Haute cour de justice pour une répression des manifestants qui avait fait une trentaine de morts et plus de 600 blessés, selon une source officielle.
Au moins cinq ministres sont également poursuivis pour « détournements de deniers publics », « enrichissement illicite » ou « malversations financières ».
« Pour nous il ne s’agit pas de juger seulement le dernier gouvernement du régime Compaoré. Il faut juger du premier au dernier gouvernement du régime Compaoré », depuis son accession au pouvoir en août 1987, jusqu’à sa chute, a déclaré le président du Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples, Chrysogone Zougmoré.
Roch Marc Christian Kaboré, actuel chef de l’Etat burkinabé était l’un des acteurs de la modification de la Constitution pour permettre à Blaise Compaoré de se maintenir au pouvoir. Il était à la tête de l’Assemblée nationale. Quelques temps après le changement, il avait fait son mea culpa après avoir rejoint l’opposition en janvier 2014, avec d’autres barons du régime, dont Salif Diallo, un ex-bras droit de Blaise Compaoré, avec qui il a créé le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP, au pouvoir).
« Si trois ans après l’insurrection populaire et près d’un an et demi après l’arrivée au pouvoir du MPP et alliés, la justice n’est pas encore dite sur certains de ces dossiers judiciaires emblématiques, on peut en conclure que les tenants du pouvoir actuel ont des choses à se reprocher », a relevé le porte-parole des comités de défense et d?approfondissement des acquis de l?insurrection populaire, Elie Tarpaga.
« Nous attendons des jugements concrets pour la satisfaction des ayants droit », a indiqué M. Zougmoré.
« Alors que le peuple réclame justice, des manoeuvres sont en cours dans les camps du pouvoir et de l?opposition pour trouver des portes de sortie sous l’appellation réconciliation nationale », a dénoncé Elie Tarpaga.
« Pour qu’il y ait réconciliation il faut qu’il y ait vérité sur les crimes de sang et les crimes économiques et surtout qu’il y ait la justice », notamment sur les « dossiers emblématiques tels que Norbert Zongo (journaliste assassiné en 1998), Dabo Boukary (étudiant torturé à mort en 1990), Thomas Sankara (ancien président tué lors du putsch de 1987) », a estimé Chrysogone Zougmoré.
Vendredi, plusieurs centaines de personnes avaient manifesté devant le palais de justice pour réclamer « vérité et justice » pour Dabo Boukary.