Questions Africaines : De quels échos retentira la mort de Mugabé ?
Mon ami,
J’ai appris que tu étais au Cameroun, que tu parcourais les rues de Yaoundé et de Douala en quête de fondements originaux à ta foi dans l’Afrique négrophobe et éprouvée par ses propres décideurs. J’espère tes conclusions.
Comme le dit notre sagesse, il n’y a pas d’arbre centenaire qui ne tombe dans une forêt sans bruire d’échos successifs. L’arbre, dont les racines se sont fragilisées avec l’érosion de la vie, s’est penché, trop penché même, avant de tomber. Malgré les ans qui l’ont fait et défait, le décès de Mugabé nous a tous interpelé en ce week-end de deuil qui fera finalement date dans les anales de notre histoire africaine. Paix sur l’orphelin, guérilléro, leader, président compris les jours pairs, incompris les jours impairs, aimé des uns, détesté des autres. Qu’y a-t-il de nouveau à cela ? Ni Jésus, ni Mahomet, ni Bouddha, encore moins Raël… ne font mieux. Laisse-moi juste m’arrêter sur deux gestes de Mugabé et sur une de ses erreurs.
Geste une : en ces années d’indépendance chaudes et décisives pour le destin de l’Afrique, il fallait du cran pour dire non. Le colon anglais, heureux de « posséder » une Afrique riche dans ses airs, sur son sol et dans son sous-sol, était malheureux d’y voir vivre les milliers de Tributs noires et « sauvages ». Au péril de sa vie, troquant sa jeunesse contre son idéal, Mugabé a pris le maquis. La Zanu-PF en sortit vainqueur, Mugabé acquit de la popularité. Demain, les historiens et analystes nous diront mieux les véritables acquis.
Geste deux : la vaste Afrique des safaris est aussi une terre qui supporte des peuples aux cultures sobres et respectueuses de la nature. Mais le partage des terres, comme le découpage berlinois de l’Afrique, n’a jamais été qu’a l’avantage des colons rhodésiens. Comment redonner espoir aux siens ? Mugabé, courageusement, engagea la réforme agraire. Là aussi les historiens, demain, nous diront ce qu’il en retourne.
Erreur : pesante Grâce. Mugabé, comme Ben Ali, aimait trop son épouse qui le voyait toujours jeune, alors même que les années le ridaient et s’affaiblissaient.
Au Cameroun où tu séjournes, dis-moi de quels échos résonne ce décès de Mugabé, loin d’Hararé, comme pour Mobutu éloigné du Zaïre. Dis-moi si notre » soeur » voit notre « papa » toujours si jeune.
Les Pères de la Nation et les dirigeants des États sont-ils conscients des mutations sociales actuelles et de la sagesse de plier bagage quand vient l’heure de partir ?
C’est une question africaine ouverte. Vos avis nous intéressent.
A lundi prochain..