La diplomatie a ses langages et ses codes que seuls les férus de sémiologie peuvent décrypter. Le message du chef de la diplomatie française à l’endroit du président du Niger le 5 novembre 2020 entre dans ce registre. Alors que deux élections présidentielles viennent de se tenir en Afrique de l’ouest, le message de Jean-Yves le Drian ne tombera pas dans des oreilles de sourds à Conakry et à Abidjan…
Le Ministre français des Affaires Etrangère, Jean Yves le Drian, était au Niger hier pour selon lui saluer le Président Issoufou. Ce dernier, contrairement à ses homologues ouest-africains, notamment Ouattara et Alpha Condé, n’a pas brigué un troisième mandat.
Se félicitant du fait que les élections présidentielles au Niger » vont avoir lieu au moment où elles doivent avoir lieu, dans le respect de la Constitution. », le Ministre français a affirmé que , »la qualité de l’élection au Niger sera une référence pour toute l’Afrique. »
Une phrase avec une charge sémantique diplomatique très puissante. En effet, à qui peut bien s’adresser le diplomate français en alléguant que l’élection au Niger, qui n’a pas encore eu lieu, sera une « référence pour toute l’Afrique » ? Assurément aux autorités guinéennes et ivoiriennes.
En principe, si elles avaient respecté les canons démocratiques standards, les présidentielles du 18 Octobre en Guinée et celle du 31 octobre en Côte d’Ivoire auraient été citées en exemple. Cela au moment où des présidentielles vont suivre au Ghana, au Burkina et au Bénin. Mais ce n’est pas le cas.
En Guinée comme en Côte d’Ivoire, la France a « pris note » des résultats controversés donnés par des Commissions électorales contestées. En Guinée encore « La France, qui avait déjà exprimé sa préoccupation sur le caractère non consensuel du fichier électoral, partage les interrogations exprimées par l’Union européenne sur la crédibilité des résultats qui devront être levées de façon transparente« .
Sur l’élection ivoirienne, la France s’est aussi étonnée des « disparités » constatées dans plusieurs régions. Toute cette phraséologie diplomatique pour ne pas heurter les deux gouvernements en question. Mais personne n’est dupe, sur ce que la France pense des deux chefs d’Etat qui ont changé leurs Constitutions ou les ont interprétées en leur faveur, pour briguer un 3e mandat.
Les félicitations anticipées à Issoufou au Niger sont semble-il l’expression d’un désaveu sur les pratiques électorales en Guinée et en Côte d’Ivoire.