Libération de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé : Bensouda dit non, elle donne les raisons
Bensouda, procureure chargée de l’affaire Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé avec son équipe exposent depuis ce lundi matin à la Haye, pour expliquer les raisons du nouvel appel de l’acquittement de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé.
Depuis ce matin, la procureure de la Cour Pénale Internationale et son équipe exposent pour donner les raisons de l’appel sur l’acquittement de l’ex président ivoirien, Laurent Gbagbo et de son ministre Charles Blé Goudé. Selon les informations reçues, l’accusation a trois jours pour exposer. L’audience a débuté ce lundi et prendra fin le mercredi prochain.
Le bureau de la procureure évoque des vices de procédure. Selon nos sources, la procureure avait déjà déposé cette requête devant la cour 6 mois après l’acquittement des deux hommes.
En effet, la procureure Fatou Bensouda a interjeté appel en septembre 2019 contre l’acquittement prononcé en janvier de la même année contre Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Selon l’accusation, la chambre de première instance a commis des erreurs de droit qui ont eu pour conséquence l’acquittement des deux hommes.
Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé ont été acquittés le 25 janvier 2019. Cette décision avait été prise par la majorité des juges de la Cour. C’est six mois après que l’accusation a déposé son mémoire. Vu la date de dépôt du mémoire de l’accusation et le manque de temps des juges pour l’analyse des 4 600 pièces à conviction et les 96 témoignages présentés, l’accusation estime que cela a eu un impact sur le résultat de la Cour.
Me Paolina Massidda, avocate des victimes de la crise de 2010 à 2011 en Côte d’Ivoire, a déclaré que « le droit à la vérité, à la justice et éventuellement à des réparations a été biaisé en raison de l’incapacité de la chambre de première instance à mener une procédure équitable. Nous avons identifié plusieurs erreurs dans la décision écrite des juges. Ils ne sont pas parvenus à faire la lumière sur la crise post-électorale en Côte d’Ivoire. »
La défense indique que les arguments évoqués par l’accusation sont creux. Pour la défense, l’accusation a eu tout le temps de présenter les preuves qui incriminent Laurent Ggagbo et Charles Blé Goudé dans la crise ivoirienne de 2011.
En raison de la pandémie du coronavirus, l’audience qui se déroulera sur trois jours ce fait de façon virtuelle. Laurent Gbagbo a de ce fait suivi cette audience depuis son domicile, par contre Charles Blé Goudé, s’est rendu dans la salle d’audience. Toutes les mesures ont été prises pour le respect des mesures barrières édictées par les autorités des Pays Bas.
Deux issues possibles
A l’issue des trois jours de procès, deux options s’offrent aux juges. La chambre d’appel peut donner raison à la procureure Fatou Bensouda et il y aura un nouveau procès. Ou l’acquittement de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé est confirmé et ils seront libérés sans conditions.
Si ce dernier scénario se produisait, l’image de la Cour pénale internationale serait endommagée, selon Ibrahima Kane, spécialiste des questions de justice internationale à l’Open society initiative for West Africa (Osiwa), basée à Dakar.
Selon lui, « c’est moins un cinglant désaveu pour madame Bensouda qu’un cinglant désaveu pour la Cour elle-même. Parce que le cas Gbagbo n’est que le énième exemple pour montrer comment le bureau du procureur, depuis Ocampo, (Luis Moreno-Ocampo, le premier procureur de la Cour pénale internationale, du 16 juin 2003 au 16 juin 2012) n’a pas fait un travail sérieux de collecte d’informations dans les cas qui lui avaient été soumis. Si l’on compare cette cour avec le travail qui a été fait par le Tribunal pénal international pour le Rwanda ou son pendant européen, l‘ex–Yougoslavie, on voit nettement une différence dans le travail qui avait été fait sur le terrain. »