Libération de Gbagbo: l’avis de Ouattara selon les avocats, son lieu de résidence proposé
Répondant aux questions du confrère Jeune Afrique, Me Jean-Paul Benoit et Me Jean-Pierre Mignard, avocats de la Côte d’Ivoire, ont évoqué le procès de Laurent Gbagbo devant la CPI. A la question de savoir si le procès est très long, les deux hommes de droit ont sensiblement les mêmes opinions.
Jean Paul Benoit « Il y a effectivement eu une initiative au nom de « la solidarité socialiste » d’un certain nombre de chefs d’État africains, qui aurait été conduite par Alpha Condé. Il aurait été demandé à ce que cette demande soit relayée par François Hollande, alors Président. Ce dernier s’y est opposé. J’ai dit publiquement que cette démarche était totalement inopportune et contre-productive. Je connais bien Alpha Condé pour qui j’ai de la considération et de l’amitié. Je pense qu’il l’a compris. Tout ceci fait partie de l’agitation , notamment via les réseaux sociaux, autour du procès de Laurent Gbagbo. »
Jean Pierre Mignard « Cette démarche est très intéressante. Au-delà du cas Gbagbo, ces chefs d’État ne se disent-ils pas aussi que la CPI est lointaine, inaccessible donc pas sujette aux pressions ? On a peut être affaire à une réaction nationaliste qui correspond à un souverainiste orienté dans le but de transférer ces procédures en Afrique. Pourquoi pas d’ailleurs? Le procès Hissène Habré s’est fait. Les juridictions internationales et continentales peuvent cohabiter. D’ailleurs, cette collaboration est bénéfique. Elle peut permettre d’accélérer la mise en place des juridictions régionales en Afrique, capables de faire le travail de la CPI avec le même souci d’indépendance, la même qualité et la même rigueur. »
La position de l’État de Côte d’Ivoire sur une éventuelle libération de Laurent Gbagbo
Pour Jean Paul Benoit « À ce stade, la position du président Ouattara et de l’État ivoirien est inchangée : le procès de Laurent Gbagbo doit se dérouler normalement à la CPI sans tentative de pressions ou d’instrumentalisation de quelque nature qu’elle soit.. Mais dans toute procédure, quand quelqu’un est en détention, son défenseur a toujours la possibilité de demander une libération conditionnelle ou une assignation à résidence »
« Une telle demande est effectivement pendante mais la chambre d’appel n’a pas encore été saisie. Il y aura des vacances judiciaires du 22 juillet au 14 août. Je pense qu’après cette période le procès sera repris. À ce moment-là, la Cour, sur ce sujet, aura l’obligation de consulter l’État de Côte d’Ivoire. Nous produirons donc un mémoire pour répondre aux questions ou aux demandes de la Cour. »
Si la position des juges évoluaient. Laurent Gbagbo serait-il remis en liberté provisoire ?
Jean Paul Benoit : « Je l’ignore à ce jour. Toutefois, j’imagine que l’on s’orienterait non pas vers une libération conditionnelle, mais plutôt vers une assignation à résidence surveillée. C’est ce que la Cour et le procureur pourraient envisager. Mais, à mon avis, si une assignation à résidence était décidée, elle devrait être très encadrée, garantir la représentation de Laurent Gbagbo devant la Cour et sa sécurité et qu’elle ne provoque pas des troubles graves à l’ordre public dans un certain nombre de pays africains, notamment en Côte d’Ivoire. »
Jean Pierre Mignard : Le seul point sur lequel la Côte d’ivoire peut avoir son mot à dire concerne les conséquences sur son sol. Il ne faut pas que Gbagbo se mette à organiser des manifestations à Abidjan ! Toutefois, nous ne nous faisons pas d’illusion. Si la Cour venait à accéder à cette demande, en prenant une décision souveraine et acceptable pour la Côte d’Ivoire, la défense estimera que c’est une victoire. D’un autre côté, ils ne pourront plus utiliser l’argument de la victimisation de Laurent Gbagbo.
Dans quel pays pourrait atterrir Laurent Gbagbo ?
Jean Paul Benoit : La solution la plus simple serait qu’il reste aux Pays-Bas.