Le gouvernement français a introduit samedi un nouvel organe pour remodeler l’islam en France, dans le cadre des efforts du président Emmanuel Macron pour le débarrasser de l’extrémisme.
La direction du Forum de l’islam en France sera composée d’ecclésiastiques et de laïcs pour aider à guider la plus grande communauté musulmane d’Europe occidentale. Tous ses membres seront triés sur le volet par le gouvernement et les femmes représenteront au moins un quart d’entre eux.
Avec la France ensanglantée par les attaques extrémistes islamiques passées et ayant des centaines de citoyens qui sont allés combattre avec des djihadistes en Syrie ces dernières années, peu de gens ne sont pas d’accord sur le fait que la radicalisation est un danger. Mais les critiques voient également les efforts comme un stratagème politique pour attirer les électeurs de droite vers le parti centriste de Macron avant l’élection présidentielle française du 10 avril.
Les partisans disent que cela assurera la sécurité du pays – et de ses 5 millions de musulmans – et garantira que les pratiques musulmanes en France adhèrent à la valeur chère au pays de la laïcité dans la vie publique.
Pourtant, les critiques, y compris de nombreux musulmans qui considèrent la religion comme faisant partie de leur identité française, affirment que la dernière initiative du gouvernement est une autre étape dans la discrimination institutionnalisée qui tient toute la communauté responsable des attaques violentes de quelques-uns et constitue un autre obstacle dans leur vie publique.
Il remplace le Conseil français du culte musulman, un groupe créé en 2003 par l’ancien président Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur. Le Conseil a servi d’interlocuteur entre le gouvernement et les chefs religieux.
« Nous devons tourner la page », a déclaré le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin lors de la réunion inaugurale du forum samedi au Conseil économique, social et environnemental à Paris. « Nous relançons les relations entre l’État et la foi (…) (basées sur) une nouvelle forme de dialogue qui sera plus ouverte, plus inclusive et plus représentative de la diversité de l’islam en France. »
L’islam est la deuxième religion en France, sans chef unique et de multiples souches représentées, du modéré au salafiste avec une interprétation rigoureuse de la religion jusqu’aux arrivistes carrément radicaux.
Le projet de Macron comprend des mesures telles que la formation d’imams en France au lieu de les faire venir de Turquie, du Maroc ou d’Algérie – un plan que beaucoup de membres de la communauté musulmane approuvent. Cela brise également la direction centralisée des clercs.
« Un seul représentant de la foi musulmane, qui maîtrise tous les métiers, n’existe plus », a déclaré Darmanin. Les femmes et les hommes « qui tirent leur légitimité de leur travail et de leur expertise dans un domaine » engageront le dialogue avec l’Etat, a-t-il expliqué.
Les musulmans sont divisés sur le projet. Certains croyants visitant la Grande Mosquée de Paris pour les prières du vendredi ont prudemment accueilli l’idée, tandis que d’autres craignent que cela n’aille trop loin en essayant de contrôler leur foi, ou disent que le gouvernement a choisi les institutions islamiques mais n’oserait pas suggérer de tels changements aux chrétiens. .
Hamoud ben Bouzid, un Parisien de 51 ans, était optimiste quant au plan de Macron et à ses efforts pour inclure différentes voix de la communauté musulmane afin de montrer à la société au sens large sa diversité. Les membres du clergé « ne parlent pas au nom de tous les citoyens musulmans » de France, a-t-il dit.
« Nous vivons dans un pays laïc, alors pourquoi ne pas élargir le forum et donner la parole à beaucoup plus de musulmans en France ? dit ben Bouzid. « Je voudrais que les musulmans soient entendus en tant que citoyens dans ce pays, pas en tant que musulmans. En tant que citoyens à part entière.
Les musulmans de France se plaignent depuis longtemps de discriminations dans la vie quotidienne, allant d’être repérés par la police pour des contrôles d’identité à des discriminations dans la recherche d’emploi. Chaque fois que la violence extrémiste frappe, par des agresseurs nés à l’étranger ou par des jeunes nés en France, les musulmans de France sont soupçonnés et poussés à dénoncer la violence.
L’année dernière, le parlement français a approuvé une loi visant à renforcer la surveillance des mosquées, des écoles et des clubs sportifs. Le gouvernement affirme qu’il était nécessaire de protéger la France des islamistes radicaux et de promouvoir le respect de la laïcité et des droits des femmes. La loi a été utilisée pour fermer plusieurs mosquées et groupes communautaires.