De plus en plus d’économistes suggèrent l’utilisation de monnaies virtuelles, ou cryptomonnaies, afin d’apporter des solutions aux personnes non bancarisées en Afrique. Et à ce jeu, le « Facebook coin » Libra pourrait bien sortir vainqueur…
Bitcoin ou Libra ? Entre les deux, l’Afrique balance…
La propagation des cryptodevises en Afrique le montre : le continent est particulièrement intéressé par ces nouveaux moyens de paiement, notamment dans les économies touchées par une forte inflation. Face à cela, le Bitcoin a su montrer ses qualités. Cette monnaie virtuelle ne nécessite pas d’intermédiaire comme les banques, et elle peut être échangée directement avec des téléphones mobiles. C’est donc l’idéal pour des populations, qui accèdent à Internet en majorité via leurs smartphones. Le fonctionnement décentralisé du Bitcoin, qui ne nécessite pas de banque centrale, lui permet également de rester indépendant.
Les variations du prix du Bitcoin (BTC) ont cependant montré que le BTC est plus considéré comme un actif d’investissement. Sa grande volatilité peut en effet rendre difficile les achats « courants » et favorise les transactions importantes. En Afrique comme ailleurs, le Bitcoin est donc surtout utilisé comme réserve de valeur. Cela laisse la place à une autre monnaie complémentaire, et c’est cet espace que semble viser Libra, la fameuse cryptodevise de Facebook.
Libra, un cryptoactif « stable »
Pour l’Afrique, l’utilisation du Libra a en effet un gros avantage : sa valeur sera fixe et adossée à un ensemble de devises solides, dont l’euro (EUR), la livre britannique (GBP) et le dollar américain (USD). Comme le rappelle Jérôme Mathis, un économiste qui a publié une tribune sur le sujet dans le Monde, cela positionne Libra en concurrence direct avec des services de transfert d’argent, qui sont légion sur le continent. D’autant plus que le géant des réseaux sociaux a su s’entourer de marques d’ampleur : PayPal, Visa et MasterCard notamment… Même si ces derniers ont récemment fait part de leurs hésitations devant un Libra qui peine à convaincre les régulateurs au niveau européen.
Pour Mathis, l’arrivée du Libra en Afrique aura le même potentiel révolutionnaire que la mise en circulation de l’éco, censé remplacer le franc CFA. Il permettrait à toute une frange de la population jeune et dynamique d’avoir enfin accès à des moyens de paiements rapides, moins engoncés dans des réglementations rigides que les banques. Pour rappel, en Afrique subsaharienne, ce sont deux tiers de la population qui sont actuellement non-bancarisées.
Quel que soit le projet de cryptomonnaie qui parviendra à se diffuser massivement sur le continent africain, une chose est sûre : les monnaies virtuelles ont de sérieuses cartes à jouer dans les prochaines décennies. Certains espèrent cependant que le continent parviendra à sortir sa propre cryptodevise, plutôt que de compter sur des technologies de paiements externes. Mais pour l’instant, peu de projets « made in Africa » sont encore apparus dans la sphère crypto. Officiellement annoncé en 2018, le AfriUnionCoin (AUC), censé proposer une cryptomonnaie commune à l’échelle du continent, a encore du mal à se développer. L’Afrique n’aura donc peut-être pas d’autre choix que d’adopter une cryptomonnaie déjà établie. Et Facebook, avec ses plus de deux milliards d’utilisateurs mondiaux, pourrait bien avoir l’influence nécessaire pour s’imposer.