Cameroun: Des évêques dénoncent les barbaries dans la zone anglophone
Face à la tension socio-politique dans les zones anglophones au Cameroun, des évêques catholiques ont fait des déclarations pour dénoncer la “barbarie” et “l’usage irresponsable” des armes à feu pour réprimer des civils.
“Nous condamnons (…) la barbarie et l’usage irresponsable d’armes à feu contre les civils non armés par les Forces de défense et de sécurité, même en réaction à des provocations”, écrivent les évêques de la province ecclésiale de Bamenda, couvrant les régions du nord-ouest et du sud-ouest.
Certains fidèles qui tentaient simplement de se rendre à la messe ont été “pourchassés dans leurs maisons, certains arrêtés, d’autres mutilés, tandis que d’autres encore dont des adolescents sans défense et des personnes âgées, ont été tués par des tirs, notamment depuis des hélicoptères”, accusent ces évêques.
“Des gens ont perdu des proches dans ces meurtres brutaux, et ignorent même parfois ce que sont devenus les corps”, emportés “on ne sait où”, s’offusquent-ils, faisant par ailleurs état de nombreuses arrestations.
A Bamesing (nord-ouest), des “jeunes hommes ont été capturés et fusillés dans les jambes”, ajoutent-ils, qualifiant d’ “horribles” les “images d’actes de violence commis contre des civils non armés et innocents”, et s’interrogeant sur le sort des personnes arrêtées et conduites vers des lieux inconnus.
La conférence épiscopale “appelle le gouvernement à relâcher tous ceux qui ont été arrêtés en lien avec cette crise”, et déclare faire du 14 octobre une journée de deuil “pour tous ceux qui sont morts à cause de la crise socio-politique actuelle”.
Dans une autre déclaration, Ni John Fru Ndi, président du Social democratic front (SDF), principal parti d’opposition, a dénoncé “la répression massive et brutale des populations” des régions anglophones, notamment lors des manifestations de dimanche. “Les assassinats, la destruction des biens publics et privés, les arrestations et tortures massives des populations (dans ces deux régions) sous l’instigation (du président) Paul Biya sont sans précédant dans l’histoire (du Cameroun)”. L’opposant a accusé M. Biya d’avoir “ordonné à son armée de tirer à balles réelles pour tuer des manifestants non armés, portant simplement des arbres de paix”.
Selon Yaoundé, les forces de sécurité et de défense ont agi en légitime défense.
Dimanche, les indépendantistes anglophones du Cameroun ont tenté de manifester pour proclamer symboliquement l’“indépendance” de ces deux régions.
Au moins quatorze personnes ont été tuées dans les violences en marge de cette proclamation symbolique, selon un bilan établi par l’AFP, ainsi que cinq prisonniers qui tentaient de s‘évader. Des ONG locales évoquent des bilans bien plus lourds.
Depuis novembre 2016, la minorité anglophone, qui représente environ 20% des 22 millions de Camerounais et 2 régions sur 10, proteste contre ce qu’elle appelle sa “marginalisation” dans la société.
Certains anglophones exigent le retour au fédéralisme. Une minorité réclame la partition du Cameroun. Deux scénarios que refuse catégoriquement Yaoundé, qui avait déployé d’importantes forces de sécurité en amont des manifestations prévues dans ces régions.