Noela Rukundo et son mari s’étaient installés en Australie. En février 2015, le couple avait décidé de se rendre à leur Burundi natal pour assister aux funérailles de la belle-mère de Noela Rukundo. Un décès qui l’affectait beaucoup. «Je venais de perdre la dernière personne que j’appelais « maman ». C’était très douloureux, j’étais très stressée.» confie-t-elle à la BBC.
Au lieu où se déroulent les obsèques, Noela Rukundo a des malaises et elle commence à se sentir mal. Son mari l’appelle, elle lui explique qu’elle se sent mal. Son mari lui suggère d’aller faire un tour plutôt que d’aller se coucher, de prendre un peu l’air. Elle l’écoute.
La voilà embarquée dans une voiture, coincée entre deux hommes armés. Noela Rukundo vient d’être enlevée par des tueurs à gage. Ils lui bandent les yeux. Après 30 à 40 minutes de route, la voiture s’arrête. Noela sort. Elle est emmenée dans un bâtiment puis se retrouve attachée à une chaise. Quelques heures plus tard, on la détache. «J’ai ouvert la porte et j’ai vu un homme venir vers moi. Puis il a pointé un pistolet sur moi», raconte-t-elle.
«Qu’as-tu fait à cet homme ? Pourquoi cet homme nous a-t-il demandé de te tuer ?», l’interrogent-ils. Noel Rukundo ne comprend pas de qui ils parlent. «Ton mari !». Elle refuse d’y croire.
Le chef du gang appelle le commanditaire du meurtre, met le haut-parleur. «On l’a», lui dit-il. Et l’interlocuteur de répondre : «Tuez-la.» Noela Rukundo reconnaît la voix de son mari. «J’avais l’impression que ma tête allait exploser, se souvient-elle. Je savais que c’était un homme violent. Mais je ne pensais pas qu’il pouvait me tuer. J’aimais cet homme de tout mon cœur !». Noela Rukundo croyait qu’elle devait mourir, que rien ne pouvait la sauver.
«On ne va pas te tuer. On ne tue pas les femmes et les enfants», lâche pourtant un des tueurs à gage. Les présumés tueurs rappellent le mari, en profitent pour lui extorquer un peu plus d’argent en lui affirmant que la cible est bel et bien morte. Les tueurs à gage abandonnent Noela Rukundo en vie au bord d’une route après deux jours de captivité et avec un cadeau : les enregistrements des conversations téléphoniques au cours desquelles Balenga Kalala parle du meurtre et des transferts d’argent.
De retour en Australie, le mari de Noela informe la communauté de la mort de sa femme dans un tragique accident. Il reçoit les proches et les visiteurs venus le réconforter, il reçoit aussi leurs dons d’argent. Pendant ce temps, Noela Rukundo attend patiemment que les derniers visiteurs quittent sa maison avant de faire sa grande entrée.
Le dernier visiteur parti, elle sort de sa voiture. «Est-ce que je vois mal ? Est-ce un fantôme ?», s’interroge à voix haute son mari, incrédule. «Surprise ! Je suis en vie !», s’amuse la prétendue défunte. Afin de vérifier qu’il ne rêve pas, il la touche et fait un bond arrière, avant de se mettre à crier et de lâcher : «Je m’excuse pour tout.» En l’occurrence, pour avoir engagé des tueurs à gage afin de l’éliminer.
C’est ainsi que l’arrivée de Noela à ses propres funérailles met fin à la mascarade de son mari. Le mari avoue, lui explique qu’il a voulu la tuer par jalousie, parce qu’il avait peur qu’elle le quitte pour un autre homme. Elle enregistre tout. Le 11 décembre dernier, il a plaidé coupable d’incitation au meurtre et a été condamné à neuf ans de prison. Noela Rukundo, elle, se retrouve exclue de sa communauté, considérée comme responsable de l’emprisonnement de son mari. «Mais je resterai debout, je suis une femme forte, assure-t-elle. Je démarre une nouvelle vie maintenant.»
Source: libération